Ghost In The Shell

Qui n'a jamais entendu parler de « Ghost In The Shell » ? Prouesse technique de l'animation dans les années 90, reconnu comme étant l'un des premiers véritables dessins animés pour adulte par l'Occident, il est aujourd'hui élevé au rang de culte pour tous les fans des univers CyberPunk. Cependant et avant tout, GITS est une bande dessinée Japonaise, de la meilleure qualité qui soit. Il s'agit sûrement de LA BD de l'univers Cyberpunk, encore aujourd'hui.

Résumer GITS ? Impossible. L'histoire et l'univers créés par Masamune Shirow prendraient plus de place et de temps que je n'en possède actuellement. Faisons néanmoins une tentative de présentation en quelques lignes :

En 2029, l'ère de l'information a atteint son paroxysme. Les humains sont reliés à un réseau corporatiste couvrant l'intégralité de la planète. Les informations filent à travers la toile plus vite que les pensées. Les individus reliés entre eux à tout moment, rare sont les personnes non connectées.
Dans ce monde informatisé, le Major Motoko Kusanagi dirige un groupe d'élite, masqué sous l'appellation de « libération des otages », chargé en réalité des basses besognes pour le Gouvernement Japonais. Lutte contre le terrorisme, contre la corruption ou la trahison envers la nation, tout ce qui pourrait mettre en danger la Nation sur l'Archipel est susceptible d'être traité par le Major et ses hommes.
En toile de fond à ses enquêtes, la Section 9 doit aussi enquêter sur l'apparition d'un Hacker surdoué, le Marionnettiste. Enquête qui prendra toute sa dimension, et tout son sens, dans le Tome 2.

Le Manga nous présente les principaux protagonistes de l'histoire à travers différentes enquêtes, parfois politiques, parfois policières, mais jamais inintéressantes. Mais son véritable intérêt n'est pas là.
Masamune Shirow est un homme passionné par les Technologies de pointe, et le devenir de l'humanité grâce à ces dernières. Persuadé que l'avenir de l'homme se trouve au cœur des machines et de la communication réseau, il développe un monde incroyable, mais pas improbable, dans un futur proche.

Dans cet univers ou l'Intelligence Artificielle côtoie tous les jours ses créateurs, les questions affluent. Le nom « Ghost In The Shell » est une référence à ses questions.
Ici, le Ghost n'est pas un Fantôme, mais plutôt un « esprit », une sorte de « fond spirituel » qui serait propre, unique, à chaque être humain. Cela pourrait être son âme, sa personne, cela n'est jamais bien défini par l'auteur, afin que chacun puisse se faire son idée. Le titre est donc une référence à « L'esprit » habitant la « coquille » (« Shell » en anglais), ou autrement dit, l'âme qui pourrait vivre indépendamment ou non du corps, que celui-ci soit organique, ou mécanique.

C'est le fil rouge de toute l'histoire. Les questions, plutôt philosophique, que pose l'auteur sont nombreuses et reliées les unes aux autres, mais toujours dans le même sens : Comment définir ce qui est vivant de ce qui ne l'est pas ? Une machine ayant une mémoire, un caractère mais pas de Ghost pourrait être considérée comme vivante, humaine ? Ou ne s'agit il que d'une vulgaire copie ? Inversement, le Ghost privé de corps continuerait-il à définir la personne à qui il appartient, ou perdrait-il tout son sens ?

Cela peut surprendre, emmêler, voire effrayer certains lecteurs, et c'est compréhensible. L'auteur lui-même est souvent dans l'obligation d'ajouter des notes pour expliquer son monde, si vaste, si riche, si compliqué. A travers ses dernières, on visualise un peu plus sa création, où il voulait en venir. Il nous mène à travers l'histoire de ce groupe antiterroriste vers un univers de remise en question, où l'esprit prédomine sur le corps, où la science peut remplacer, recréer l'homme, mais pas son âme. Un océan d'interrogation auquel ne répond pas toujours Shirow, volontairement. Encore une fois, à vous de vous faire vos propres idées.

GITS est un classique, un monument de la Bande dessiné, ainsi que du CyberPunk. Il apporte un monde incroyablement riche, complexe, possédant ses propres codes, ses propres héros. Ici tout n'est pas rose, au contraire, lorsque l'on gratte, tout apparaît pourri. Au milieu de la décadence de leur société, rongé par de multiples maux, un groupe se bat pour la préserver. C'est un monde froid, mécanisé, où les sentiments n'ont aucunes places. Une vision qui peut paraître pessimiste, mais terriblement possible.

Tout est bon ici pour que l'on remette notre monde, notre façon de vivre, nos technologies, et nos dépendances vis-à-vis de ces dernières, en question.
D'ailleurs, la complexité de son message est telle qu'il vous faudra le relire plusieurs fois pour bien saisir l'intégralité de son étendue. Après plusieurs années, ne vous étonnez pas de découvrir des nouveautés que vous n'aviez pas perçu, ou tout simplement pas compris. Pénétrer l'univers de Shirow est difficile, rebutant. Mais une fois dedans, c'est une expérience sans équivalence.

Un must, immanquable, que tous les passionnés se doivent de parcourir, ne serait-ce que par curiosité.

Quelques Infos :

Année de Parution en France :
Tome 1 : 1996
Tome 2 : 1996
Tome 3 : 2002
Tome 4 : 2003

Editeur : Glénat
Collection : Akira
Genre: CyberPunk.

A noter que le manga comporte quelques scènes violentes, ainsi que des messages pouvant être mal interprétés par de jeunes enfants. L'éditeur conseille le titre à partir de 12 ans.